24 avril 2012
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Elle aurait bien voulu qu'il soit tout un poème.
Il était grand, n'était pas beau, sentait l'odeur du linge qu'il avait oublié deux jours dans le tambour de la machine à laver, avait des mains rugueuses malgré l'imprégnation de la graisse des
machines outils qu'il réparait dans l'atelier.
Son regard absorbé sous les capots, il devinait sa présence inopportune derrière lui et le lui signifiait par des gestes agacés.
Ce n'était pas le moment. Ce n'était jamais le moment.
Elle attendait un mot, un son, un petit bout de voix, celle qui l'avait séduite avant même qu'elle ne l'ait aperçu la première fois. Cette voix qui vibrait gravement dans sa gorge, résonnant le
long de sa cloison nasale avant de s'échapper pour disperser son charme.
Elle attendait un peu, racontait, questionnait, espérait... s'en allait.
La voix restait muette.
Elle se souvenait alors de la vieille Catalina qui, en parlant des hommes, lui avait dit un jour :
" tu sais petite, dans chaque lit, il y a des poux"...
Alors à la tombée de nuit, pour conjurer le sort, elle éclairait les vitraux de l'applique murale au dessus de la porte d'entrée, espérant qu'il s'arrête … ce serait le moment ... et
qu'enfin il lui parle, pour qu'elle vive un peu.